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Ukraine: la condamnation de Ioulia Timochenko critiquée en Occident et en Russie

La condamnation à sept ans de prison de l'ex-Premier ministre ukrainien Ioulia Timochenko a suscité de vives critiques en Occident et en Russie, et de nombreux responsables étrangers ont souhaité que Mme Timochenko bénéficie d'un jugement en appel équitable.

Fustigée par les Etats-Unis et par plusieurs pays européens, la sentence prononcée mardi par la justice ukrainienne pour abus de pouvoir a aussi suscité les inquiétudes de l'ONU, de l'Union européenne, de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et du Conseil de l'Europe.

A Washington, la Maison Blanche a réclamé la libération de Mme Timochenko, également condamnée à trois ans d'inéligibilité et à verser 200 millions de dollars de dommages. L'Ukraine doit "redoubler d'efforts pour protéger la démocratie et l'Etat de droit pour tous ses ressortissants", a déclaré le porte-parole de la Maison Blanche, Jay Carney. Les Etats-Unis "exhortent (les autorités) à libérer Mme Timochenko, d'autres dirigeants politiques et d'anciens responsables gouvernementaux", a-t-il dit.

"Nous sommes profondément déçus" par ce verdict qui "soulève de graves inquiétudes concernant l'engagement du gouvernement ukrainien envers la démocratie et l'Etat de droit", a déclaré la porte-parole du département d'Etat, Victoria Nuland.

Egérie de la Révolution orange en 2004 et principale opposante au président ukrainien Viktor Ianoukovitch, Mme Timochenko a été condamnée pour avoir signé en 2009, alors qu'elle était Premier ministre et sans l'autorisation de son gouvernement, des contrats gaziers avec la Russie qui ont été jugés désavantageux pour l'Ukraine.

Ces contrats avaient mis fin à un grave conflit russo-ukrainien qui perturbait les approvisionnements en gaz de l'Europe.

Le Premier ministre russe, Vladimir Poutine, s'est dit étonné. "Vraiment, je ne comprends pas très bien pourquoi elle a pris sept ans", a-t-il déclaré lors d'un déplacement à Pékin, selon les agences de presse russes. "Je considère que jeter le doute sur cet ensemble d'accords est dangereux et contreproductif", a ajouté M. Poutine. Il a toutefois souligné qu'il ne prenait pas la défense de Mme Timochenko, étant donné "qu'elle est une personne orientée politiquement vers l'Occident".

Le ministère russe des Affaires étrangères a déclaré déceler dans toute l'affaire un "caractère manifestement anti-russe".

La France a vivement critiqué la décision de la justice ukrainienne.

"C'est une condamnation qui intervient au terme d'une procédure et dans des conditions non-conformes aux engagements internationaux de l'Ukraine et qui confirme le caractère inéquitable et politique du procès", a affirmé le ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé.

Il a appelé le gouvernement ukrainien à "revenir au plein respect du droit, de la justice et de ses engagements devant le Conseil de l'Europe, dont elle préside actuellement le comité des ministres".

La Pologne a elle aussi déploré le verdict. "La façon de conduire le procès et la condamnation aujourd'hui prouvent que la justice ukrainienne est politisée", a estimé le ministère polonais des Affaires étrangères.

L'UE est "profondément déçue" par un procès qui n'a pas respecté les normes internationales en matière de procédures équitables, transparentes et indépendantes", a déclaré la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton. Elle a menacé Kiev d'importantes "conséquences" si Mme Timochenko ne bénéficie pas en appel d'un procès "équitable, transparent et impartial".

Ottawa a prévenu que sa condamnation pourrait avoir de "graves conséquences" sur les relations bilatérales entre le Canada et l'Ukraine.

Les négociations en vue d'un accord d'association UE-Ukraine, comprenant un important volet commercial, sont entrées dans leur phase finale et pourraient déboucher théoriquement sur une signature en décembre.

Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, "a noté l'inquiétude manifestée et attend des procédures judiciaires encore en cours qu'elles soient conduites d'une manière équitable et impartiale", a déclaré une porte-parole adjointe de l'ONU, Vanina Maestracci.

L'OSCE et le Conseil de l'Europe ont également insisté sur la nécessité d'une procédure d'appel équitable et transparente. Amnesty International a estimé que les poursuites contre Ioulia Timochenko étaient "politiquement motivées" et a réclamé sa "libération immédiate".