Pourquoi les leaders israéliens n’étaient pas aux funérailles de Mandela?

Le premier ministre d’Israël, Benjamin Netanyahu et son président Shimon Peres n’ont pas assisté aux cérémonies funèbres à la gloire de Nelson Mandela. Netanyahu avait pourtant rendu les hommages de rigueur au leader sud-africain décédé déclarant: «On se souviendra de lui comme du père de la nouvelle Afrique du Sud». La raison invoquée par le premier ministre d’Israël est pitoyable. Le voyage aurait coûté trop cher.


Ce prétexte en cache d’autres, inavouables. D’abord, il aurait dû frayer avec des chefs d’État et de gouvernement qui sont des adversaires déterminés d’Israël. Ensuite, il aurait été conspué par l’immense foule présente comme l’a été l’ancien président américain George W. Bush.

Le président d’Israël, Shimon Peres, a pour sa part invoqué des raisons de santé pour expliquer son absence. Dans son éloge funèbre du défunt, il avait osé dire qu’il s'est toujours senti «très proche» de Nelson Mandela. Un mensonge honteux.

Le journal israélien Haaretz dénonce en éditorial l'hypocrisie des louages de Peres qualifiant Mandela de «leader d'une immense stature» lui qui était «impliqué jusqu'au cou dans la coopération entre Israël et le régime de l'apartheid. Israël accueillait les premiers ministres sud-africains blancs en grande pompe, pendant que Mandela moisissait en prison.»

Un livre de Sasha Polakow-Suransky, rédacteur sénior à la prestigieuse revue Foreign Affairs, The Unspoken Alliance: Israel's Secret Relationship With Apartheid South Africa révèle que l’État juif a offert des armes nucléaires aux suprémacistes blancs de Pretoria pour assurer la pérennité de leur pouvoir. L’auteur rappelle que la coopération militaire clandestine entre les deux pays a été formalisée dans un accord secret signé en 1975 par Shimon Peres alors ministre israélien de la défense et le gouvernement raciste dirigé par le premier ministre B. J. Vorster, interné à cause de ses sympathies hitlériennes durant la Seconde Guerre mondiale.

Selon Polakow-Suransky, Israël a continué de fournir armes et pièces d’équipement militaire au régime de Pretoria jusqu’à l’effondrement du régime raciste et l’arrivée au pouvoir de Nelson Mandela en 1994.  

En visite à Gaza en 1999, Mandela s’était solidarisé avec les Palestiniens et les avait encouragés à poursuivre la lutte rappelant que: «nous avons connu, nous aussi, des jours terribles, le sacrifice de camarades, et de fortes frustrations», dans le combat contre le régime suprémaciste blanc soutenu par Israël.



L’ancien président Jimmy Carter avait fait scandale lorsqu’il avait déclaré en 2006 à l’occasion de la publication de son livre Palestine: Peace Not Apartheid que la politique d’occupation israélienne en Cisjordanie représentait cas d'apartheid pire que celle jadis pratiquée par les blancs d’Afrique du sud.

Analysant les relations nauséeuses d’Israël avec l’Afrique du Sud raciste, Haaretz
écrit que c’est «un bon exemple du glissement de l'utopie sioniste vers la tragédie.» Le fondateur du sionisme moderne, Theordor Herzl, parle dans un livre, Altneuland, de l'identification entre les sionistes et les noirs d'Afrique. Menahem Begin a vanté l'entreprise sioniste affirmant qu’un de ses objectifs était d’aider les Africains dans leur lutte contre le colonialisme.  

Dans ses mémoires, Nelson Mandela révèle qu’il a étudié le livre de Menachem Begin  La Révolte qui décrit les activités de l’organisation terroriste juive Irgun dans sa lutte armée contre les Britanniques pour s’en inspirer.

Les faits sont incontournables. Israël fut un des rares pays à entretenir des relations économiques et militaires très étroites avec le régime de l'apartheid. Malgré cela, le Jerusalem Post souligne la grandeur d’âme de Mandela et son absence d’amertume envers l’État juif. Après sa libération et son accession à la présidence sud-africaine, il avait affirmé que si la paix au Moyen-Orient impliquait le retrait complet des territoires occupés, elle exigeait aussi que les États arabes reconnaissent Israël dans des frontières sures et reconnues.