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Les Pussy Riot, les Nelson Mandela de notre triste époque?

Comme coup de pub, celui des Pussy Riot est dur à battre. Cela va leur valoir sans doute des millions de dollars. Si leur musique est à la hauteur de leur capacité d’attirer l’attention de la vaste congrégation des journalistes et commentateurs qui cherchent des puces à Vladimir Poutine. Le maître du Kremlin n’a pas bonne presse. L’appui que donne son gouvernement à la dictature syrienne moribonde est odieux. Mais, n’en déplaise à ses ennemis de l’intérieur comme de l’extérieur, une confortable majorité de Russes est favorable à Poutine.

Les trois punkettes russes décadentes méritaient-elles deux ans de prison pour avoir commis un sacrilège dans une cathédrale orthodoxe de Moscou? La peine est sans doute disproportionnée. Est-ce suffisant pour en faire des héroïnes des droits humains? La classe médiatique occidentale a répondu oui avec enthousiasme.

Cela m’amène à poser quelques questions qui demeureront sans réponse. Quelle aurait été la réaction de l’opinion américaine si un groupe de punkettes miteuses était allé faire son cirque à la cathédrale nationale de Washington en dénonçant l’appui de la droite religieuse au parti républicain et à Israël? Je ne suis pas sûr que l’intervention policière et ses suites judiciaires auraient été bien en deçà de ce qu’on a vu à Moscou.

 Et quelle aurait été la réaction de la gauche américaine, si des punkettes d’extrême droite (oui ça existe, notamment en Scandinavie) avaient envahi la principale synagogue de New York pour dénoncer le soutien apporté par la communauté juive à la politique belliqueuse d’Israël.  Elle aurait alors été d’une violence extrême. L’opération aurait été dénoncée comme une manifestation intolérable d’antisémitisme et la classe politico-médiatique aurait, à l’unanimité, réclamé les sanctions les plus draconiennes contre le groupe. Le FBI serait intervenu puisque la profanation d’une synagogue aurait été considérée comme un crime raciste. Des manifestations de masse pour dénoncer le groupe se seraient produites dans toutes les grandes villes du monde. Des appels à la tolérance religieuse auraient été lancés par le Pape et d’autres autorités morales ou prétendues telles.

Un scénario semblable est aussi prévisible de la gauche multiculturaliste planétaire si des punkettes avaient décidé de faire leur numéro dans une mosquée en Occident. Dans ce cas, des réactions d’une violence inouïe auraient sans doute éclaté dans des dizaines de villes musulmanes du monde entier provoquant des centaines de morts. Si un groupe punk féministe avait osé une manifestation semblable dans un pays musulman, il aurait été mis à mort sur place sans autre forme de procès.

Mais les transgressions sacrilèges ne visaient qu’un lieu de culte chrétien. Pas de quoi déchaîner les intellectuels progressistes et les leaders d’opinion. La clause de l’indignation multiculturelle ne s’applique pas aux religions chrétiennes associées à l'Occident.


Même les opposants russes sont perplexes devant cette avalanche d'appuis aux punkettes. Le régime russe est responsable de bien pires violations des droits humains qui n’ont jamais soulevé un tel tollé universel.

Les imprésarios et les organisateurs de tournées vont se précipiter à Moscou pour proposer leurs services aux Pussy Riot afin d'organiser la tournée mondiale qui va suivre leur libération. L’industrie mondiale du vêtement se prépare également à exploiter leur look. D’ici trois mois, tous les ados de la planète arboreront un chandail à cagoule à leur effigie. Ce n’est pas tous les jours que Madonna, Yoko Ono et Human Rights Watch endossent un produit.

Le Kremlin est en train de faire des Pussy  Riot les Nelson Mandela de notre époque. Bien triste époque. Le mieux qu’il pourrait faire serait de les gracier rapidement et ainsi porter un dur coup à leurs ambitions en minimisant leurs intérêts pour les grands promoteurs de spectacles.