La guerre civile syrienne est en train d’enflammer l’Irak

Une vague d'attentats, dont quatorze à la voiture piégée, a tué une soixantaine de personnes et en a blessé plus d’une centaine hier dans des localités à majorité chiites d’Irak.

La semaine dernière, plus de 150 personnes ont été tuées, dont 27 samedi, lorsqu'un terroriste s’est fait sauter dans des funérailles près de Mossoul.

L’ONU recense 804 victimes d’attentats pour le mois dernier et plus de 4000 depuis le début de l’année. L’Irak traverse une vague d’attentats comparable à celle qui a suivi l’occupation du pays par l’armée américaine en 2003.

Le gouvernement du premier ministre Nouri Al-Maliki est impuissant à réduire le niveau de violence et à assurer la sécurité de minorité sunnite qui constitue 20 % de la population. La branche irakienne d’Al-Qaida, l'État islamique d’Irak et du Levant, est issue de la communauté sunnite.

L’ÉIIL a réussi au mois de juillet une spectaculaire opération qui lui a permis de faire évader 500 prisonniers de deux prisons près de Bagdad dont celle d'Abou Ghraïb, une des plus sécuritaires du pays, notoire parce que des soldats américains y avait torturé des prisonniers irakiens en 2004.

Al-Qaïda prend pour cible des endroits où sont rassemblées de nombreuses personnes comme des rues commerciales ou des terrains de football afin de démontrer l’impuissance du gouvernement à protéger la population. Il attise ainsi la haine de la majorité chiite contre les sunnites qui sont frappés en représailles. L’insécurité et la crainte gagnent ainsi l’ensemble de la société.

Personne ne veut encore utiliser l’expression, mais tout indique que l’Irak est en train de sombrer dans une guerre civile sectaire comme sa voisine, la Syrie.

L'Irak est officiellement neutre dans le conflit syrien. Le gouvernement chiite à Bagdad a, maintes fois, appelé à une solution politique et pacifique à la crise. Dans les faits, c’est un allié du régime Assad. 

Le gouvernement Al-Maliki joue un rôle majeur dans la guerre civile syrienne. Le mois dernier il a déployé vingt mille militaires irakiens le long de la frontière avec la Syrie pour empêcher toute coopération entre les filiales d’Al-Qaeda qui combattent en Syrie et en Irak. Bagdad se plaint qu’une partie des armes fournies par les Occidentaux et l’Arabie saoudite aux rebelles sunnites se retrouvent aux mains des insurgés irakiens augmentant le niveau de violence dans le pays.

Mais de son côté, il permet aux avions iraniens bourrés d’armes destinés aux militaires d’Assad de survoler son territoire. Ce n’est pas tout. Les Gardiens de la Révolution iraniens opèrent un centre d’entrainement près de Téhéran pour former des miliciens chiites de tous les pays arabes destinés à combattre aux côtés du régime syrien. Ils rejoignent la Syrie à travers l’Irak avec la collaboration discrète des autorités de Bagdad.

Bagdad finance aussi à même ses revenus pétroliers une partie des achats d’armes de régime Assad à Moscou et il lui fournit du pétrole à rabais pour ses véhicules et ses avions.

Maliki, qui est aussi ministre de la Défense, gouverne l'Irak comme un véritable dictateur. Il prend seul toutes les décisions. Les Saoudiens disent aux Américains depuis des années de se méfier qu’Al-Maliki qu'ils considèrent comme un agent d’influence iranien. Difficile dans le Moyen-Orient actuel de distinguer ses amis de ses ennemis.

Même sans armes chimiques, le régime Assad, qui peut compter sur le soutien de l’Iran, du Hezbollah libanais et du gouvernement Maliki en Irak, est en mesure de résister longtemps aux rebelles. Mais une victoire des insurgés avec les représailles qu’elle déclencherait contre les chiites syriens embraserait certainement l’Irak et le Liban.

Le conflit millénaire entre sunnites et chiites est en train de se répandre dans tous les pays de la région où les deux déclinaisons de l’Islam ont des présences significatives.