Ces maires qui aiment trop le sport!



Je dois vous le dire d’entrée de jeu, ça ne me dérange pas le moindrement que le maire Coderre donne son opinion vingt-deux fois par jour sur Twitter même lorsque cela signifie qu’il joue au gérant d’estrades et décide que David Desharnais devrait aller se voir ailleurs, préférablement dans le sud de l’Ontario avec les Bulldogs de Hamilton, club-école de vos Glorieux dans la Ligue Américaine. Il n’est probablement pas le seul féfan fini de la flanelle à faire des crises d’urticaire à chaque fois qu’un des p’tits gars du bleu-blanc-rouge ne joue pas avec le panache de Maurice Richard, la dextérité de Jean Béliveau ou le style flamboyant de Guy Lafleur. En passant, même ces trois icônes-là ont déjà été huées par certains partisans mal-engueulés au Forum. Je suis certain que Louis de Ville Mercier, aussi actif sur les tribunes téléphoniques que Coderre sur les réseaux sociaux, n’en pense pas moins. Ce qui m’étonne, pour tout vous dire, c’est que l’un comme l’autre pense que leur opinion nous intéresse. Ce que l’un ou l’autre pense de Desharnais est, en ce qui me concerne, aussi fascinant que de lire sur Tweeter que votre beau-frère vous a invité à l’enregistrement d’une obscure émission culturelle que personne ne regarde à Télé-Québec. Ne vous gênez pas de l’écrire pour autant.

J’ai connu Denis Coderre quand il était un jeune journaliste sportif. Il a fait le bon choix en optant pour la politique, probablement le seul sport dont il puisse se targuer d’être un véritable connaisseur. Il aime le sport, c’est un partisan et c’est son droit. Quant à son opinion elle vaut celle de tout amateur de sport, ni plus, ni moins. Ce n’est pas un expert qui livre une analyse éclairée. Il peut gazouiller tant qu’il veut, ça vaut ce que ça vaut. Comme dirait mon ami Ron Fournier, on passe à un autre appel!  Évidemment, il s’expose, en froissant les autorités pontificales du Temple des Glorieux. Comme l’Archevêché d’autrefois ces gens-là, surtout les directeurs de conscience responsables des communications, n’ont aucun sens de l’humour quand un vulgaire fidèle ose remettre en cause la doctrine. Sois donc prévenu mon cher Denis, ce genre de gazouillis pourrait te valoir une excommunion prononcée in-absentia par le conclave des infaillibles de la Sainte-Flanelle. Imagine s’il fallait qu’un jour l’on t’interdise l’accès au Centre Bell ou même sa Cage et son infect nourriture servant à endurcir les fidèles! Le pouvoir du maire de Montréal, ou même du Premier Ministre est temporel. Le Royaume de la Foi pratiquée avec dévotion au Centre Bell est d’un ordre infiniment plus important, ne l’oublie jamais.

De toute façon, il y a pire que les montées de lait du maire Coderre sur Twitter. La réaction de son homologue de Québec, le tout aussi tonitruant Badaboum Labeaume, qui croit que notre maire s’appelle Drolet, me laisse croire que si jamais les Nordiques devaient ressusciter comme le fantasment des milliers d’amateurs, la rivalité avec le village atteindra rapidement des sommets de ridicule à ce jour inégalés. Moi qui croyait que l’ancienne rivalité avait éveillé les plus bas instincts imaginables parmi les amateurs de hockey du Québec j’ai bien peur de n’avoir rien vu. Celle-ci n’est encore qu’une chimère lointaine que déjà l’on sent que les premiers magistrats de Montréal et Québec ne se peuvent plus d’en découdre publiquement à la défense de leur club de hockey! Avant au moins le stuff de junior ça ne se passait que derrière le banc ou parfois sur la passerelle de presse entre journalistes trop partisans qui menaçaient de se battre comme des enfants mal-engueulés. Là, ça risque de se dérouler dans nos hôtels de ville. Après avoir chassé les bandits voilà qu’on y a invité des clowns. La bonne nouvelle c’est que même si ça nous coûte aussi cher, au moins ça va nous faire rire plutôt que de nous arracher des larmes à chaque nouvel épisode de la Commission Charbonneau. La vie est trop courte pour pleurer, vaut mieux en rire, ne croyez-vous pas, même si nous ne seront peut-être pas plus heureux pour autant?

Mais bon, vous avez raison, il y pire encore. Pas besoin de regarder bien loin. Nos guignols de Montréal et Québec demeurent tout de même sympathiques dans leur folklorisme un peu rural à côté du gros ivrogne qui sévit dans la Ville-Reine. Coderre et Labeaume ce sont des Ti-Gus et Ti-Mousse à côté de Rob Ford, de loin le plus loufoque, le plus hilarant et le plus inénarrable des maires à l’échelle planétaire! Comme ils disaient dans le Dîner de Con au sujet de l’ineffable François Pignon, celui-là c’est un champion du monde hors-catégorie! Il a repoussé les limites du mauvais goût  à un niveau stratosphérique. Ce qui n’aura pas empêché les patrons de Sun News d’offrir à Ford et son frère, une émission de télé à compter de lundi prochain. Vous voyez bien que le ridicule ne tue pas, surtout pas à Toronto la pure et encore moins au sein de l’Empire Quebecor. J’imagine que c’est le même principe qui prévalait à l’époque des Tannants. Le bon peuple aime bien les batailles de tarte à la crème et l’humour au premier degré. Avec Rob Ford, il est plus que servi, ça c’est certain. D’ailleurs, ça ne m’étonne même pas qu’il conserve l’appui indéfectible de ceux qui l’ont porté au pouvoir à la mairie de la plus grosse ville du pays. En démocratie, n’oublions jamais que nous avons toujours les élus que l’on mérite. Évidemment, cela en dit long sur les vertus de la démocratie telle que nous la concevons en Amérique.

Le Canadien n’a peut-être pas apprécié le commentaire de Coderre sur Desharnais, le maire Labeaume beurre peut-être trop épais avec ses futurs anciens Nordiques encore imaginaires, mais ce n’est rien à côté de ce Rob Ford qui n’en finit plus de se couvrir de ridicule tout en affichant fièrement son chandail des Argonauts de Toronto qui, croit-il de surcroît, vont botter le cul des petits Tiger Cats de Hamilton ce dimanche. Il a même tenu à le dire publiquement, comme un gros butor qui prend un malin plaisir à bousculer les maigrichons dans une cour d’école. Celle-là, la direction des Argonauts ne l’a vraiment pas trouvé drôle et ce, au point d’émettre un communiqué se dissociant du maire Ford, de ses propos et de l’ensemble de son œuvre. C’est certainement la première fois dans l’histoire du Canada qu’une équipe sportive professionnelle s’empresse de désavouer publiquement le maire de sa ville.

Coderre va continuer de gazouiller sur tout et sur rien, généralement les deux à la fois. Labeaume va continuer de flatter Bettman et Péladeau dans le sens du poil jusqu’à ce qu’il l’ait son club de hockey. Quant à Ford, il n’a pas semblé comprendre que ses Argos n’ont rien à cirer de sa gênante partisannerie. En fait, je me demande parfois si son niveau de conscience n’a pas été irrémédiablement détruit par ses excès de drogues et d’alcool. Non, quand nos maires aiment trop le sport, ce n’est pas toujours très édifiant. Pour paraphraser Pagnol, quand on fera danser les gros caves, il ne risque pas d’être dans l’orchestre! Combien vous gagez qu’il sera au Rogers Center dimanche en bédaine, complètement bourré, le visage peint en bleu pour appuyer son équipe préférée

Si ça se produit, j’espère que Denis Coderre aura quelque chose d’amusant à gazouiller là-dessus!