Après l’attentat de Moscou, ce que l’on sait de la présence de l’État islamique du Khorasan en France

L’État islamique du Khorasan (EI-K), le groupe qui a revendiqué l’attaque meurtrière de Moscou, est surveillé de près par les autorités françaises.

Le chef de l’agence de la Direction générale de la sécurité intérieure, Nicolas Lerner, ici photographier le 5 novembre 2018 à Levallois-Perret à l’ouest de Paris.

TERRORISME - La vigilance maximale « urgence attentat » est de retour, à quatre mois des Jeux olympiques de Paris 2024. Après l’attentat qui a fait au moins 137 morts à Moscou, la France a de nouveau rehaussé son dispositif Vigipirate cette semaine. Cette attaque menée dans une salle de concert est la plus meurtrière revendiquée par l’État islamique sur le sol européen.

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C’est plus précisément la branche afghane de Daesh, l’État islamique du Khorasan (EI-K), qui a revendiqué l’attaque, images à l’appui, sur le réseau Telegram. Or, ce lundi 25 mars, Emmanuel Macron a déclaré que ce groupe djihadiste « a conduit ces derniers mois plusieurs tentatives sur notre propre sol ».

Une réunion de « l’ensemble des acteurs du renseignement », organisée par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) ce jeudi 28 mars, doit d’ailleurs permettre de « tirer toutes les conséquences de l’attentat de Moscou ». Les experts doivent en particulier se pencher sur la présence et l’influence de l’EI-K en France. Le HuffPost fait le point sur ce que l’on sait en la matière.

La DGSI se réunit ce jeudi pour évaluer la menace

Le groupe créé en 2015 compte entre 4 000 et 6 000 membres à travers le monde, selon les Nations unies. Ce sont principalement des familles originaires d’Afghanistan, d’Azerbaïdjan, de Russie, du Pakistan, d’Iran, de Turquie et d’Asie centrale. Et pour cause, comme vous pouvez le voir sur la carte ci-dessous, le Khorasan est une région historique qui couvre l’Iran, l’Afghanistan, le Turkménistan et l’Ouzbékistan.

L’EI-K est principalement connu pour son extrême brutalité et pour avoir mené un attentat d’ampleur en août 2021 dans l’aéroport international de Kaboul, où des milliers de personnes tentaient de fuir le pays après la prise de pouvoir des talibans. L’attaque a fait 182 morts. Le groupe djihadiste concentre ses actions sur l’Asie et la Russie, mais l’Europe et la France sont aussi dans son viseur.

Paris, Strasbourg… déjà plusieurs cas d’attentats en France

Dernier exemple en date : l’attaque au couteau à proximité du pont Bir-Hakeim à Paris, le 16 décembre 2023, qui a tué un touriste et blessé deux autres. L’assaillant de 27 ans avait revendiqué son attentat dans une vidéo prêtant allégeance à l’État islamique et se présentait comme un membre de la branche du Khorasan.

Autre cas identifié : l’attentat déjoué à Strasbourg en novembre 2022, juste avant l’ouverture de son très réputé marché de Noël, était aussi lié au groupe, selon les informations conjointes de BFMTV et du Figaro. « Heureusement nos services ont pu interpeller les personnes qui visaient la ville et ses habitants », a rappelé Gabriel Attal ce lundi. « Nous empêchons des attentats de se dérouler quasiment tous les mois », a insisté dans la foulée le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.

Sur les attentats déjoués au cours des dernières années – 74 depuis la vague meurtrière de 2015 dont deux depuis le début de l’année 2024 –, l’exécutif n’a pas pour habitude de révéler le profil des suspects et leur éventuelle affiliation.

Selon le magistrat à la tête du parquet national antiterroriste (Pnat), Jean-François Ricard, il pèse aujourd’hui sur la France « une menace projetée qui n’est plus totalement négligeable, notamment ce qui est lié à l’État islamique du Khorasan avec des risques de projection venant d’Asie centrale souvent avec des relais du Caucase Nord, Ingouchie, Tchétchénie, Daguestan ».

D’autres pays européens sont concernés

Le groupe afghan de l’État islamique ne vise pas seulement la France, d’autres pays sont concernés en Europe. Ce mardi 19 mars, un attentat a ainsi été déjoué par les autorités allemandes. Deux suspects afghans ont été arrêtés qui prévoyaient une attaque à Stockholm, près du Parlement Suédois. Ils sont soupçonnés d’avoir « planifié de tuer des policiers et d’autres personnes à l’aide d’armes à feu », a indiqué le parquet antiterroriste. L’un d’entre eux avait rejoint, depuis l’Allemagne, l’EI-K.

En effet, l’EI-K est la branche de l’État islamique « la plus tournée vers l’international, elle a produit de la propagande dans plus de langues que n’importe quelle autre filiale », explique auprès de l’AFP Lucas Weber, chercheur spécialisé dans les acteurs non étatiques violents. En réaction à l’attaque de Moscou ce vendredi, la ministre allemande de l’Intérieur, Nancy Faeser, a estimé qu’actuellement « la plus grosse menace islamiste en Allemagne émane de l’État islamique - province de Khorasan ». « Nos services de sécurité ont depuis longtemps à l’œil ce groupe terroriste », a-t-elle ajouté.

D’autres arrestations des membres de l’EI-K ont eu lieu aux Pays-Bas, en Belgique ou au Royaume-Uni ces dernières années, souligne le New York Times, qui rappelle que « la plupart des attentats de l’EI-K en Europe ont été déjoués, ce qui conduit à estimer que le groupe a des capacités réduites ». L’attaque d’ampleur menée à Moscou conduit cependant à réévaluer les capacités du groupe à frapper en dehors de son territoire, y compris en Europe. Une nouvelle donne qui préoccupe la France, alors qu’elle sera sous les projecteurs tout l’été.

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