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Débat Obama - Romney: prise 2

Le débat de ce soir, c’est un peu celui du 3 octobre dernier, sauf que les rôles sont inversés pour Barack Obama et Mitt Romney. C’est désormais au premier d’utiliser l’arène médiatique pour renverser la vapeur en sa faveur.

«Ce deuxième débat ne susciterait pas autant d’intérêt si Obama n’avait pas été aussi mauvais lors du précédent», commence Élisabeth Vallet, directrice de recherche à l’Observatoire des États-Unis de la Chaire Raoul-Dandurand de l’UQAM. «Le président sortant doit se racheter.»

Romney 1, Obama 0

Il faut dire que son adversaire, le républicain Mitt Romney, aura su créer la surprise lors du premier débat, il y a deux semaines. Alors qu’Obama était donné favori, que les Républicains avaient miné leur crédibilité à coups de stratégies de communication douteuses, Romney a su se montrer combatif tout s’adressant à cette fameuse classe moyenne que tous considèrent plus que jamais comme la clé de cette élection.

«C’était la première fois que Mitt Romney parvenait à donner une image positive de lui, qu’il paraissait aimable», dit Mme Vallet.

Résultat: le candidat républicain a mis son adversaire dans l’embarras. Au point que pour la première fois depuis le début de la campagne, la moyenne des sondages les plus récents le donne favori, avec une très courte avance sur le président sortant.

Romney a été bon... mais il y a surtout la contre-performance d’Obama. «C’est un excellent orateur, mais un mauvais débateur, analyse Mme Vallet. C’est son point fort comme son point faible. Il sait argumenter, mais il reste trop propre pour mettre à mort son adversaire. Jean Chrétien par exemple était capable d’être un batailleux de ruelle. C’est ce que le président des États-Unis doit pouvoir être aussi.»

Du coup, Romney est dans la position la plus confortable. En apparence en tous cas. «Il est maintenant vraiment dans la course, ce qui était impensable avant. Le nouveau défi, c’est de se maintenir à cette hauteur», tempère Mme Vallet.

Que le vrai Obama se lève!

Mais attention, il ne faut pas enterrer Obama trop vite. «Le premier débat est traditionnellement le plus dur pour le président sortant qui est toujours aux prises avec son agenda de chef de la superpuissance mondiale», explique Mme Vallet.

Imbu de sa fonction, il arrive généralement un peu trop sûr de lui et insuffisamment préparé. «Tandis que là, après sa mauvaise prestation du 3 octobre, Obama a sûrement pris le temps de s’asseoir et de faire ses devoirs», conclut-elle.

Obama est sur la corde raide, car il doit changer tout en restant lui-même, explique Mme Vallet. «Il doit être plus agressif, plus affirmatif et faire passer son message. Sauf que s’il en fait trop, il aura l’air briefé.» Un risque que le président ne peut pas se permettre de prendre.

D’abord, parce que son image tourne autour de son personnage d’homme vrai. Ensuite, parce que la formule Townhall meeting du débat (en assemblée publique, c’est-à-dire que le public est présent et pose des questions aux débatteurs) demande aux candidats de paraître particulièrement empathiques et concernés. Il faut absolument montrer que l’on est proche du peuple.

«Bush père en a fait les frais. Il avait regardé sa montre pendant la question d’un citoyen, ce qui a eu un effet dévastateur. Il n’a d’ailleurs pas été réélu», rappelle Mme Vallet.

Avance décisive

L’autre élément de suspense de ce débat, c’est que les deux candidats sont au coude-à-coude. «C’est très rare à ce stade très avancé de la campagne où l’on sait déjà toujours plus ou moins qui va l’emporter», explique Mme Vallet.

Or, il est très important de gagner avec une majorité claire, aux États-Unis encore plus qu’ailleurs. «Comme le système électoral est très disparate – chaque état a ses propres bulletins de vote, ses propres systèmes de dépouillement –, le potentiel de contestation d’un résultat peu tranché est très fort.

Et on veut surtout éviter de se retrouver dans la même situation qu’en 2000 entre Bush fils et Gore. Le pays avait alors attendu 36 jours avant de savoir qui était le président, rappelle Mme Vallet. D’autant que le même scénario aujourd’hui serait aggravé par l’omniprésence des médias sociaux qui font enfler la moindre théorie du complot. »

Cela fait pas mal de balles à saisir au bond pour les deux candidats. Réponse ce soir à 21 h, heure de Montréal.